Faut-il chercher le bonheur?

Publié le 15 Janvier 2014

Un conte philosophique écrit par Laurie Carrez, élève de termianle ES. N'hésitez pas à le commenter ou à le questionner (c'est tout en bas de la page).

 

 

Il était une fois, il n'y a pas si longtemps de cela, un enfant et son père qui vivotaient dans l’une des nombreuses chambres d'un hôpital. L’homme s'était éveillé tôt comme à son habitude pour absorber quelques denrées dans le dos de son enfant, de façon à ne pas lui exposer des aliments que son organisme n’était plus apte à assimiler. Puis il le contempla dormir. Chacun de ses souffles provoquaient en lui un sentiment de réjouissance et même de bonheur, tandis que l’idée qu’à n’importe quel moment le dernier poumon de son autre ne pourrait plus l’oxygéner, que son cœur cesserait de battre et que les machines ne seraient plus capable de le tenir en vie, le hantait. Mais il n’y avait aucune question à se poser tant qu’il respirait encore, il devait profiter de tous les instants passés à ses côtés, comme si chacun était le dernier.

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Son enfant s’éveilla à son tour et l'homme lui demanda alors comment il se portait en ce jour. Mais son autre lui expliqua qu'il ne pensait pas assister à un prochain lever de soleil, qu'il se sentait toute chose, affaiblit chaque jour un peu plus par la maladie tandis qu'aucun donneur ne se faisait connaître: il sentait que son heure ne tarderait point. Il ajouta qu'il n'était pas juste que de nombreuses personnes comme son père, aient déjà vécu leur vie, connu le premier amour puis le second, qu'ils aient déjà eu le temps de réaliser de beaux projets ou même leurs rêves, qu'ils se soient mariés et aient eu beaucoup enfants ; tandis que de son côté il ne pouvait à un tel avenir sachant qu'il se demandait chaque soir s'il réussirait à passer la nuit.

Il se plaignît donc que sa quête du bonheur était compromise car sa maladie était venue à lui trop tôt et qu'il n'avait pas encore eu le temps de vivre sa vie comme il l’entendait, qu'il n'y avait qu' à lui que ça arrivait et que lui seul souffrait. Son père lui fît remarquer que les hôpitaux étaient saturés et que des centaines de personnes se trouvaient entre la vie et la mort. Cependant, l'enfant lui répondit que cela n'avait rien à voir, que son cas était différent et que personne n'était aussi malheureux que lui. L'après-midi passait et la nuit commença à tomber. Il fût venu le temps pour l'enfant de sombrer dans son lit et de s’ensevelir dans ces beaux draps blancs en attendant un jour nouveau. L’enfant s’endormit donc sur ses quelques mots auprès de son père, mais sans le savoir, pour la dernière fois.

Le lendemain, quand l’enfant s’éveilla, il remarqua que sa chambre n’était plus la même. Plus aucun tuyau n’était branché sur son corps. Il ne se sentait plus dépendant, il était libre et fort aussi. Il s'exclama qu'il allait mieux, qu'il se sentait entier, qu'il se sentait renaître ! Il appela donc son père pour lui faire part de tout ce bonheur. Puis, dans l’attente d’une réponse, l’enfant décida de se lever quand il vît deux lettres posées sur la table.

Il s’empressa alors de les ouvrir. La première était écrite à la main et ne comportait que quelques phrases. «Aujourd’hui est un jour nouveau, il marque le commencement de ta nouvelle vie et la continuité de la mienne. Mon amour pour toi ne cessera pas, je t’emporte avec moi dans mon âme. Par amour, ton père.» Il se jeta alors sur la seconde lettre espérant trouver une explication à ce message si flou : « DON D’ORGANE. Deux poumons greffés. Le donateur n’a plus que son cœur qui bat, aucun autre organe ne répond : le cerveau est détruit et seules les machines le maintiennent en vie. Lien avec la personne greffée: père. ACTE DE DECES. Mort encéphalique auto-infligée». L’enfant s’effondra alors, cria, pleura, tapa sur les meubles et renversa des objets. Maintenant qu’il avait obtenu ce prolongement de vie qu'il souhaitait le plus pour accéder au bonheur, il n’eût plus que ses larmes pour se consoler.

Rédigé par Laulevant

Publié dans #Texte libre

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